Dans les haricots…

Nous vous avions annoncé notre intention de trouver un petit boulot pour compenser les fortunes que nous coûte la voiture en essence. Ce fut un échec à Broome, mais nous retentons l’essai à Carnarvon… et nous le transformons!

À notre arrivée dans la petite ville de Carnarvon (4000 habitants à tout casser), on devine que l’agriculture doit être le secteur principal d’activité. D’une, les rues portent les appellations de “North ou South Plantation”, de deux, le centre ville est inexistant donc on imagine que la vie est ailleurs, de trois, on ne croise que des gens à l’aspect “terreux” au supermarché du coin, donc on comprend vite que nous sommes dans un espace agricole. Et qui dit espace agricole dit besoin de main d’oeuvre saisonnière, non? On y croit, on va tenter notre chance dans le fruitpicking bien connu des backpackers en Australie, le petit job qui permet de faire quelques dollars sans s’arrêter trop longtemps au fin fond de bourgades où les dimanches sont trop longs.

Toutefois, il nous suffit d’un après midi pour déchanter… Les pancartes “No Job” défilent sous nos yeux, certaines bien menaçantes où on n’osera pas insister!

On apprend au visitor centre que la gérante de l’auberge du coin a de bons tuyaux. Elle nous dit d’aller voir Ashley au Gum Tree café, il chercherait 2 personnes. On rencontre Ashley qui nous dit que son bon pote David lui a dit la veille qu’il cherchait des gens… Après avoir été baladés de ferme en ferme, nous tombons finalement chez David, dans sa plantation de bananes et de haricots verts, et c’est parti pour 4 semaines!


L’Installation

Il nous faudra quelques jours pour nous mettre dans l’ambiance. Finis les paysages merveilleux devant lesquels déployer notre tente, plus de kilomètres à parcourir chaque jour, plus de visites, baignades ou découvertes locales, juste nous et des haricots!

On est contents de retrouver la lumière, l’électricité, l’usage d’un frigo et l’eau chaude mais il va quand même falloir faire avec les moyens du bord…

La tente est décrochée du toit de la voiture et installée dans la cour de la ferme, à défaut de vue sur la mer, on se contentera du jardinet abandonné aux mauvaises herbes.

Le salon est déplacé vers la grange qui sert d’entrepôt et nous nous barricadons un coin cuisine entre les cartons d’emballage de bananes et les bidons vides de mort aux rats…

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La salle de bain est des plus rudimentaires, les bottes terreuses des travailleurs en ont usé le sol de béton décrépit, ce qui nous amènera à d’innombrables contorsions au sortir de la douche pour en toucher le moins possible!

Pas le grand luxe donc, on est loin de notre vie new yorkaise, mais c’est un autre rythme dans notre voyage et une nouvelle aventure!


Au Boulot

Les journées démarrent tôt, nos premiers haricots sont cueillis à 6h45 alors que les températures sont encore fraîches… pendant 6 heures, nous parcourrons les rangées avec notre chariot, alignant les haricots, triant les petits moches, les tordus, les bedonants et les bossus, besogne monotone et terriblement répétitive.

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Selon le jour, l’ambiance diffère: soit le fermier partage avec nous sa sono à plein volume et nous étourdit de sa radio locale 99.7 Top Hits. Soit, on tente d’écourter les heures en écoutant les podcasts de France Culture quand on a besoin d’un peu de stimulation intellectuelle ou ceux de My dad wrote a porno pour rire un bon coup. Et alors, le temps passe plus vite, on ne compte plus les haricots, nos caisses s’emplissent, notre esprit ailleurs.

A la fin de la matinée, après une courte pause café, cachés dans les haricots… il nous faut laver, mettre en boite, empaqueter notre récolte avant de nous octroyer une heure de pause dans notre cuisine de fortune.

L’après midi ne diffère en rien du programme matinal et on recommence les mêmes gestes, dans une chaleur plus pesante. Mais ils sont aussi pleins de découvertes, le champ de haricots révèlent ses mystères dans la lumière du soleil! Tantôt le chien nous débusque d’énormes lézards, tantôt on découvre la cachette d’oisillons à l’ombre d’une feuille de haricot, les yeux encore clos alors que leur bec est grand ouvert, ou bien des plants un peu spéciaux qu’on n’aurait pas imagine trouver là!

Quand il fait trop chaud, on est de faction aux bananes, à l’ombre de l’entrepôt. Travail à la chaine: découpe des grappes, emballage, fermeture, mise en caisse, il faut suivre le rythme et être à l’écoute des blagues de papy Mario dont l’anglais reste balbutiant même passés 49 ans d’expatriation!

Apres 8 à 10h de travail aux champs, on est généralement lessivés. Un moment pour diner, jouer quelques notes de ukulélé, s’envoyer un verre de vin ou lire un peu, et on n’entendra plus parler de nous avant le lendemain matin…

Et le programme se répète, jour après jour, monotone et éreintant mais lucratif, il nous permettra de poursuivre notre route dans quelques jours…


Le culte du travail saisonnier en Australie

Qui n’a jamais entendu parler du fruitpicking/woofing en Australie? Bien connu des backpackers, nous découvrons lors de cette experience les avantages du travail saisonnier en Australie:

  • Faire du cash en peu de temps

A condition d’être prêt à travailler et de sortir un peu de sa zone de confort, car soyons clairs, ce sont généralement des boulots que les Australiens ne veulent pas faire, il est possible de gagner de précieux dollars en travaillant dans la cueillette saisonnière, ce qui permet ensuite de continuer à voyager.

Nous sommes payés à l’heure, donc le plus nous travaillons, le plus nous gagnons. Certains autres sont rémunérés au rendement, ce qui est un peu plus difficile selon le secteur – la cagette de cresson ne paye pas fort. Certains agriculteurs vous paient au noir, d’autres comme ceux qui nous emploient font les choses correctement, fournissent fiches de paie et prélèvent nos taxes à la source.

Si vous êtes reconnus résidents fiscaux Australiens, et que vous gagnez moins de 18000$/an, alors la totalité des impôts prélevés vous sera reversée à la fin de l’année fiscale: en bref, pas d’impôts pour les voyageurs-travailleurs.

Il faut toutefois avoir la chance de tomber au bon endroit au bon moment car les récoltes sont saisonnières, les employeurs différents (on nous a fortement déconseillés de travailler pour les agriculteurs asiatiques qui semblent être sans pitié pour leur main d’oeuvre), et le travail plus ou moins difficiles selon le produit récolté (les fraises sont apparemment le cauchemar des travailleurs et de leur dos).

  • Rencontrer d’autres voyageurs

Travailler dans la cueillette saisonnière, c’est aussi rencontrer d’autres voyageurs avec qui vous partagez le travail mais aussi des moments conviviaux! Il y a à Carnarvon un nombre considérable de travailleurs venant d’Asie, on est un peu surpris de voir par exemple que sur 5 restaurants en ville, 3 sont asiatiques! Aby et Jeff de Taiwan, et Sam de Hong-Kong partagent le champ de haricots avec nous et même si le premier contact est timide, la différence culturelle s’estompe un peu autour de diners concoctés ensemble. Nous leur ferons découvrir les lasagnes qu’ils ne connaissent que décongelées au micro-ondes, et ils nous feront goûter leur poulet aux épices chinoises et leur oeuf frit au bok choy! On ne comprend toujours ni le mandarin, ni le cantonais mais on a appris à décrypter leur anglais, c’est un premier pas!

 

  • Prolonger son sejour en Australie

Ça n’est pas notre objectif mais travailler dans des plantations permet à ceux qui le désirent d’étendre pour 12 mois supplémentaires leurs permis vacances-travail en Australie. La condition: avoir bossé 3 mois dans le secteur agricole. Bon à savoir pour ceux qui souhaitent faire un maximum d’argent tout en voyageant et revenir ensuite à la maison avec quelques économies…

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